mardi 25 mars 2008

Rickshaw

Il est une institution à Chennai et, paraît-il, un peu partout en Inde, qui peut surprendre. Son nom ? Le rickshaw. Mais qu'est cette créature au nom exotique qui apparaît çà et là dans les billets de ce blog ?

Eh bien, le rickshaw est en quelque sorte au monde mécanique ce que l'ornithorynque est au règne animal : il y a en lui un peu de tout véhicule. Le scooter, pour la motorisation, le tricycle pour le nombre de roues, le taxi pour l'utilité, et le caneton pour la couleur du plumage et le cri distinctif.

Ils sont omniprésents dans les rues, des grandes artères aux venelles et autres chemins de terre, et souvent quand vous marchez l'un d'eux ralentira et fera un peu de chemin à votre côté, votre peau diaphane étant la promesse d'une récolte exceptionnelle de roupies.

Cette hardiesse tourne à l'agressivité dans les lieux touristiques, où en plus le conducteur veut vous emmener à un hôtel formidable tenu par l'un de ses amis, et vous réclame des petites fortunes pour un déplacement somme toute assez court. Plus d'une fois, nous avons dû renoncer à une course, la somme annoncée étant au-delà de toute mesure.

Et contrairement à ce que l'on pourrait croire, les rickshaws sont des animaux grégaires : si le chauffeur à qui vous vous adressez ne connaît pas votre destination, aussitôt la meute environnante se pressera autour de lui et après plusieurs minutes de vives palabres il pourra vous mener en lieu sûr.

dimanche 23 mars 2008

Un peu de spiritualité dans ce monde de brutes

Il est dit, apparemment, que tous nos départs en week-end se feront sous la menace d'un ciel d'orage. Malgré l'étouffante humidité ambiante, nous sommes donc partis vendredi en fin de matinée pour la petite ville de Mahabalipuram, située sur la côte, à mi-chemin entre Chennai et Pondichéry.

Sa particularité, qui lui vaut d'être inscrite au patrimoine mondial de l'humanité et d'accueillir nos charismatiques personnes l'espace d'une nuit, réside en ses temples nombreux et anciens. L'un d'entre eux, que nous voyions de notre hôtel en front de mer, fait face au golfe du Bengale. Malheureusement, l'orage d'une folle violence qui a battu la côte dans l'après-midi nous a cloués sur la terrasse, couverte heureusement, de la gargotte envahie de touristes français où nous nous étions restaurés.

Et une terrible malédiction nous a frappés à partir de ce moment, voulant qu'à chaque pas que nous faisions hors du couvert, la pluie nous arrose généreusement. C'est ainsi que samedi, nous avons décidé de prendre la vache sacrée par les cornes et d'aller quand même visiter les temples. Les cieux ont été relativement cléments, mais la chaleur d'étuve nous a inondés de sueur et de pluie mêlées.

Dans les temples disséminés aux alentours du village, souvent creusés dans la roche ou taillés directement (de haut en bas !) sur le rocher même, des chèvres, des français et les inévitables chiens jouaient gaiement, et un singe regardait passer le troupeau de son perchoir au sommet du plus haut d'entre eux.

Le temps restant à la pluie, nous avons renoncé à la suite du voyage, Kanchipuram, où les temples paraît-il sont bien plus dispersés. Nous y irons un jour de ciel bleu.

PS : et le désormais traditionnel (les traditions commencent vite chez moi) lien vers les photos.

jeudi 20 mars 2008

De l'art de la table

Il est surprenant, pour l'occidental naïf qui débarque en Inde, de constater qu'ici les couverts sont bannis des assiettes. Les assiettes, d'ailleurs, sont souvent elles-mêmes bannies de la table au profit d'une simple feuille de bananier. Sous peine de passer pour un puritain mal dégrossi, il faut donc s'y faire : ici, on mange avec les mains.

En fait de mains, c'est plutôt de la seule main droite qu'il s'agit, la gauche étant reléguée à des tâches peu compatibles avec l'hygiène alimentaire. Pas évident, donc, de découper son naan, et savoir saisir les morceaux de légume sans trop se salir requiert un certain apprentissage. Mais c'est pour le riz que la situation est plus critique.

En fait, la solution est assez simple et efficace : on recueille du riz sur le bout des doigts pliés et joints, et le pouce servira à pousser la nourriture dans la bouche sans trop ressembler à un ours affamé se jetant sur les entrailles du caribou qu'il vient d'occire.

Et à la fin du repas, on vous apporte un petit bol d'eau chaude dans laquelle nage un quartier de citron, grâce auquel votre dextre repartira propre du restaurant.

dimanche 16 mars 2008

Pondichéry - jour 2

À la télévision passe un match du seul sport pour lequel les Indiens manifestent une once de talent : le cricket. Dans un effort surhumain, Hubert réussit à en comprendre au moins grossièrement les règles, et j'écoute passif et ébahi son interprétation des différents actes de jeu.

Le lendemain, nouvelle promenade dans les rues de l'ancienne cité coloniale sous un ciel plus clément que le jour de notre arrivée. Nous lézardons à la terrasse d'un café, plongés dans nos lectures, profitant de la brise marine qui tempère la brute ardeur du soleil.

Le soir, nous mangeons une pizza étonnamment bonne, arrosée de l'inévitable Kingfisher, puis nous dirigeons vers le bar de la veille. Nous y retrouvons notre camarade espagnol, attablé avec un australien en vadrouille. Nous rejoignent une portugaise en vacances et deux étudiantes en anthropologie néérlandaises. Les discussions vont bon train à cette tablée cosmopolite.

Ce matin, nous prenons le bus de retour après une brève promenade dans le marché où nous croisons les deux hollandaises. Je discute un peu avec un certain Gabriel-Sharif, ingénieur chez Areva. Soudain le bus freine et fait un écart : la police a bloqué une voie, théâtre d'un accident mortel entre une moto et... une vache.

PS : le lien vers les photos prises à Pondichéry.

Pondichéry

Une fois installés à l'hôtel, nous décidons d'aller nous promener dans la ville. Premières constatations : l'atmosphère ici est très différente de celle de Chennai, au sens propre comme au figuré. Les rues sont bien moins sales, et il règne ici une ambiance quelque peu déliquescente, une ambiance de ville provinciale déménagée sous les tropiques puis abandonnée. Toutes les rues portent encore leurs noms français, et l'époque coloniale acquiert ici une réalité tangible ; les couleurs de la France ne sont jamais loin, parfois juste un peu délavées ou rongées par des moisissures terriblement vivaces.

Les habitants jouent de ce statut à part et chaque restaurant, ici, se doit d'afficher des plats aux noms français la plupart du temps mal orthographiés. C'est pourtant un atout profitable, car Pondichéry est une destination touristique de quelque envergure, les vendeurs ambulants en attestent qui essaient de nous vendre d'inutiles souvenirs de mauvaise facture.

Un peu incommodés par ces derniers, désireux surtout de découvrir les lieux, nous nous aventurons dans la ville tamoule, un peu plus crasseuse, un peu plus animée aussi. Dans un magasin à l'enseigne un peu rouillée, une dame assez élégante nous accueille ; Hubert repartira avec des vêtements, quant à moi, j'achèterai une statuette de Ganesh.

La propriétaire du magasin est intarissable. De son long discours ressort qu'elle était professeur d'économie à l'université, puis que, poussée par un désir de mettre en pratique sa discipline, elle a créé cette petite mais florissante entreprise. Elle a des contacts un peu partout sur la planète avec le monde de la mode, et se targue de commerce équitable.

Dans la rue, une vieille dame et sa fille, hilares, m'interpellent : on me demande des photos. Je m'exécute et réalise un cliché de la femme avec son bébé, puis plus loin ce sont des gamins qui interrompent leurs jeux pour me réclamer une faveur similaire. Les deux garçons prennent des poses, gâchent un peu la photo. Ils encouragent une petite fille timide à se faire photographier, elle est radieuse.

Nous mangeons le soir dans un bar branché, tenu par une occidentale. Dans cette enclave, l'alcool est en vente libre, mais on ne peut s'affranchir de la sempiternelle Kingfisher, la bière nationale, brassée à Bangalore. Nous nous en contentons.

Quand le ciel bas et lourd...

De Chennai à Pondichéry

C'est un ciel d'orage qui a accompagné la fin de semaine à Chennai. Jeudi, plusieurs averses ont jeté sur la ville un lourd rideau de pluie, sans pour autant amener l'atmosphère à une température raisonnable. La soirée nous a permis de constater que le whisky indien est un authentique tord-boyaux.

Le lendemain, nous sommes partis pour Pondichéry. L'ancien comptoir français est à environ deux cents kilomètres de la capitale du Tamil Nadu, et le meilleur moyen de s'y rendre est de prendre le car. Celui dans lequel nous sommes montés est une sorte de monstre antédiluvien, tout acier et simili-cuir. La route longe la côte, traversant des paysages de paluds, rizières et marais salants où méditent à cloche-pied d'innombrables échassiers que le spectacle de notre léviathan lancé de toute sa masse dans la pluie ne semblait pas perturber.

Nous sommes arrivés vers treize heures dans la cité-état, pour y déguster quelque honnête pitance sous le regard impénétrable d'un cafard de passage. Un rickshaw à qui nous avions demandé de nous mener à la plage nous a baladés d'hôtel en hôtel, bien que nous lui ayions indiqué que nous n'avions pas besoin de ses services pour nous loger. Nous avons finalement payé la course, démesurément rallongée par ces circonvolutions forcées, le triple du prix convenu initialement. Au moins étions-nous au sec pendant l'averse...

Quelques instants après, nous nous sommes mis à la recherche d'un hôtel, bientôt suivis par un baroudeur espagnol avec qui nous avons sympathisé. Après quelques essais infructueux, nous avons trouvé une chambre dans la ville française, non loin de la côte.

mardi 11 mars 2008

Tout n'est pas cirrhose au Tamil Nadu

Après Amélie Nothomb, c'est Gérard de Villiers que je me retrouve à parodier dans un titre de message. Et la raison en est limpide comme l'eau de roche -- dont justement il n'est pas question ici. En effet, le charmant état du Tamil Nadu a une particularité législative autre que l'absence totale de code de la route et de normes de pollution : il est prohibitionniste.

Le commerce de l'alcool est ici réglementé sans modération, au point que pas un seul bar n'orne les rues de Chennai. Quelques points de vente, tous contrôlés par l'état, subsistent néanmoins. Las, nous n'en avions croisé aucun au hasard de nos pérégrinations, jusqu'à ce soir du moins. Nous revenions d'un fast-food malais quand soudain Hubert se figea. Je mis quelque temps à identifier la raison de cet arrêt : le brave animal avait identifié sa proie, une enseigne crasseuse qui affichait fièrement Wine shop.

Comme un seul homme, nous nous dirigeâmes vers l'échoppe miteuse au comptoir surmonté d'une grille massive. La faune environnante était singulièrement interlope, et les échanges alcool contre roupies ne se faisaient pas sans leur lot de regards appuyés, les mots étaient gravement chuchotés plutôt que simplement prononcés par ces hommes qui, sous un climat moins clément, auraient sûrement porté de lourds blousons de cuir par-dessus leurs débardeurs. Une fois la transaction terminée et la bouteille mise au secret dans une feuille de papier journal, le client honteux s'en allait consommer son vice le dos voûté par le poids de l'opprobre.

C'est ainsi que nous achetâmes deux bouteilles de bière, ces deux mêmes bouteilles qui en ce moment vivent innocemment leurs derniers instants dans les doux frimas de notre réfrigérateur.

lundi 10 mars 2008

Dérivées partielles

Voici venu le jour que j'ai attendu avec des sentiments mêlés - impatience et crainte, principalement, toutes deux atténuées par ce simple mais solide réconfort : je ne m'aventure pas en terre inconnue, puisque Hubert a assuré la première leçon, jeudi dernier. J'ai donc donné ce matin mon premier cours à une assistance d'une quinzaine d'élèves.

Globalement, j'en suis plutôt satisfait. Certes, je me suis un peu embrouillé sur la preuve du théorème de Schwarz, au point de reporter en annexe de la démonstration un point évident (c'était juste l'utilisation du théorème de Rolle), mais mon anglais n'était pas catastrophique et mon exposition moins brouillonne qu'elle ne le fut, par exemple, lors de ma soutenance de M1.

Les élèves sont relativement attentifs, et quand on leur demande si on peut poursuivre ou effacer, ils répondent d'un hochement de tête affirmatif. Les conventions de langage gestuel sont assez déroutantes, d'ailleurs, en pays Tamoul. Ainsi hocheront-ils la tête horizontalement pour dire oui, et agiteront-ils la main pour dire non, un peu à la manière dont nous disons au revoir. De fâcheux malentendus m'ont donc été évités par ma lecture préalable du guide Assimil, et ma susceptibilité en aura été ménagée... J'imagine avec une grande frayeur ma réaction de désespoir face à une classe qui m'eût signifié à plusieurs reprises que non, personne n'avait compris et que je ne pouvais pas continuer.

PS :

J'ai enfin mis quelques photographies en ligne à cette adresse.

samedi 8 mars 2008

De l'évanescence architectonique de Chennai

Contrairement à ce qu'un message précédent a pu faire croire, la ville de Chennai ne me déplaît pas. Elle est certes sale et la chaleur qui y sévit m'est particulièrement peu agréable, mais je me suis vite pris à trouver à ces rues cagneuses, à la foule grouillante, bruyante, pétaradante d'improbables véhicules qui les sillonne un charme indéniable.

Cependant, les éléments les plus perspicaces de ma cohorte de lecteurs (oui, je suis d'un naturel modeste, je suppose que seule une cohorte me lit) auront remarqué que, malgré mon goût immodéré pour la photographie, je n'ai pas encore offert à leurs rétines un aperçu du spectacle parfois déroutant des rues de Chennai. La raison en est fort simple : aucun des clichés que j'ai pris ne me plaît.

Je pourrais, bien sûr, invoquer de plus ou moins bonne foi quelques faciles excuses : la lumière cruelle et trop brute du soleil de l'Inde, la laideur sans conteste des bâtiments (de nombreux temples disséminés çà et là, et semble-t-il surtout aux endroits les plus improbables faisant exception), le décalage horaire, la nourriture locale, que sais-je encore ...

Mais non, il faut se rendre à l'évidence : si je n'arrive pas à prendre de photographie valable, c'est que je ne comprends pas la ville. Les bâtiments semblent jetés au hasard, ou plutôt conformés par un malin génie qui se plairait à arranger entre eux des angles improbables et des expositions inconfortables, de sorte que mon œil se perde sans espoir dans un tel dédale. Et quand une scène capte mon attention, il faut que je sois assis dans un bus mené par un conducteur fou ou qu'un mouvement de foule engloutisse à jamais le spectacle que je voulais immortaliser sur ma carte mémoire.

jeudi 6 mars 2008

Fatigue et insalubrité

Troisième jour, et toujours du mal à me défaire du décalage horaire... Ce matin, il nous a bien fallu cinq minutes pour nous décider à émerger de l'état semi-comateux qui tient lieu de sommeil sous les tropiques, et aller ouvrir la porte à laquelle tambourinaient des agents d'entretien. Je ne sais toujours pas ce qu'ils nous voulaient.

Les nuits sont chaudes et les moustiques s'insinuent dans la chambre par je ne sais quel interstice, rendant le combat pour se rendormir plus difficile encore quand, plusieurs heures avant l'aube, l'on s'éveille en sueur. Ils viennent sournoisement vous vrombir à l'oreille et vous rappeler qu'ici, mille maladies exotiques vous menacent, et que demain soir il faudra penser à prendre votre cachet de Malarone. D'autant que les proboscis ne m'ont pas épargné, malgré les manches longues, malgré la citronnelle, malgré une vigilance paranoïaque.

Les moustiques ne sont pas les seules bêtes à craindre dans les parages : la nuit, les rues obscures sont le domaine des chiens errants. Ils sont là qui vous regardent, par petits groupes de quatre ou cinq, certains endormis en travers de la route. Gare à vous si, la tête ailleurs, vous les approchez trop ! Ici la rage menace.

Et pour finir sur ces joyeux constats, il me reste à parler de la propreté des rues de Chennai... ou plutôt de leur regrettable état. Des monceaux d'ordures s'accumulent sur les bas-côtés ; le moindre espace libre, le plus petit carré de gazon est recouvert d'emballages usagés, de papiers gras, de déchets de toutes natures. Les habitations de fortune fleurissent un peu en recul ; tout un peuple vit sous la voie ferrée dans des conditions d'hygiène passablement effrayantes ; le quartier est un gigantesque égoût à ciel ouvert. À ceci s'ajoute bien sûr la puanteur, odeur sucrée et capiteuse, écœurante et intrigante à la fois, car s'y mêlent les innombrables parfums de l'Inde, épices, agrumes, et mille autres fragrances que l'on ne saurait isoler du riche édifice qu'elles bâtissent.

mardi 4 mars 2008

Premier jour

Premier jour complet en Inde, premier soleil, premiers contacts avec les autochtones. Le réveil est difficile tant la nuit fut chaude, et le décalage horaire nous engourdit. Las, nous prenons notre courage à deux mains et nos douches respectives, puis nous enhardissons au point d'aller affronter le monde extérieur.

Objectif de cette première sortie en terre inconnue : retirer de l'argent, acheter de l'eau (nous n'osons boire au robinet) et découvrir le voisinage. Le soleil frappe durement, et il faut se méfier de la circulation chaotique des véhicules -- motorisés ou non. Les chiens errants sont trop assommés par la chaleur pour se permettre, justement, le luxe d'errer dans les rues de la ville.

Nous demandons au chaland où se trouve le distributeur automatique le plus proche, et obtenons dans un anglais approximatif des informations vagues mais suffisantes pour se mettre en route. Après avoir manqué plusieurs fois de se faire écraser et demandé des indications plus précises à des passants, nous réussissons à retirer de l'argent et achetons de quoi étancher notre soif.

Nous arrivons juste à temps pour prendre le bus qui nous mène de notre logement au CMI. La route est hallucinante : rickshaws, chars à bœufs et camions se croisent, se dépassent, manquent de s'entrechoquer à chaque instant. La notion de latéralité semble accessoire sur la route, et plus d'une fois nous nous retrouvons complètement à droite pour dépasser un rickshaw qui dépasse un char à bœufs qui lui-même dépasse un camion stationné au mépris du bon sens en travers de la route. Dans le chaos ambiant, quelques vaches regardent paisiblement passer le flot rugissant.

Dès notre arrivée au CMI nous sommes pris en charge et l'on nous accompagne à notre bureau, d'où j'écris ce message au néant intersidéral. Le bâtiment est moderne, assez sobre, sa bibliothèque relativement bien fournie (elle est certes à des lieues de la richesse de celle de Normale Sup', mais l'essentiel est là, et la théorie des nombres paraît y tenir une place privilégiée). Un chercheur vient nous voir, il parle très bien français : normal, il a fait sa thèse à Paris 6. Il nous donne quelques informations sur les cours que nous allons donner, et c'est ainsi que j'apprends que j'aurai le plaisir exquis d'enseigner à un public attentif les fonctions de plusieurs variables.

Arrivée à Chennai

Bon, puisqu'il faut bien commencer, vous aurez le droit a mes premières péripéties en vrac et en qwerty (en fait en azerty maintenant que j'ai trafiqué le clavier)... Commençons par le commencement et le vol : il fut sans histoires, juste marqué par le visionnage d'une superproduction bollywoodienne -- assez traumatisant, à vrai dire. À l'arrivée, comme d'habitude je suis passé pour un terroriste (je n'ai pourtant pas trop l'air pakistanais), je veux dire par là que le douanier, patibulaire comme il se doit, a passé mon joli passeport tout neuf à son voisin, puis qu'à tour de rôle ils m'ont dévisagé, avant de finalement décider que je ne représentais pas un danger pour la sécurité nationale.

Un chauffeur nous attendait à la sortie de l'aéroport, il était une heure du matin et la température depassait sans trop d'efforts les 25 degrés celsius. Nous avons alors eu un apercu de la conduite indienne. Ce n'était pas aussi horrible que ce que j'attendais, malgré l'absence peu rassurante de ceinture de sécurité dans notre bolide. L'usage du klaxon est universel, adapté à toutes les situations : je te dépasse, je klaxonne, tu me dépasses, je klaxonne, j'accélère, je freine, je tourne, je maintiens mon allure, ... je klaxonne. Autre tic étrange : même si la conduite se fait à gauche, l'habitude et l'envie de dépasser sont telles que tout le monde roule sur la file de droite des voies rapides, si bien que les dépassements se font finalement quasi-exclusivement par la gauche.

Nous sommes venus à bout de notre trajet sans encombre, pour découvrir en vrac qu'on logeait dans la même chambre, qu'elle était climatisée, que les lits étaient en béton armé, qu'on avait accès a internet, et que nos prises électriques s'adaptaient bien aux prises locales.